mardi 1 juillet 2008

L'énigme immanentiste

La pire erreur à commettre serait de croire que ce sont les Israéliens via les Juifs d'Amérique qui gouvernent les États-Unis. Non pas que cette assertion soit totalement fantaisiste : effectivement, il existe de nombreux signes d'une implication des institutions israéliennes dans le 911 comme il existe de nombreux signes de la puissance du lobby pro-israélien aux États-Unis.
Si l'on applique l'adage : à qui profite le crime?, qui est quand même la règle d'or de toutes les enquêtes criminelles, on se rend compte que ce sont les Israéliens qui tirent directement bénéfice de la guerre contre le terrorisme et que le gouvernement israélien a influé directement pour la guerre en Irak, comme il influe directement pour promouvoir la guerre contre l'Iran, celle dont je doute qu'elle ait lieu un jour. A mon avis, le bluffe a remplacé la buffle depuis la guerre perdue par les Israéliens au Liban.
Qu'apprend-on d'essentiel sur cette guerre? Que les Israéliens ont attaqué avec la bénédiction et le soutien des Américains. D'un point de vue géostratégique, cette annonce capitale signifie tout bonnement que les institutions israéliennes travaillent main dans la main avec les institutions américaines, un peu comme ces dernières coopèrent le plus étroitement possible avec les institutions anglo-saxonnes. On a pu mesurer cette évidence avec la guerre en Irak, dont les légitimations crapuleuses ont été plus que préparées depuis Londres, mais aussi Tel-Aviv.
Il est plus fin de constater que les trois gouvernements travaillent main dans la main et que les attentats du 911 recèlent cette coopération étroite, symbiotique et énigmatique, ainsi que les opérations menées depuis lors au nom de la guerre contre le terrorisme. Tout lien entre le 911 et la guerre contre le terrorisme est totalement fortuit, un peu comme toute conséquence ne saurait en aucun cas dépendre de ses causes obvies.
Mais il faut aller plus loin et comprendre que les institutions israéliennes au fond fonctionnent à l'unisson des institutions américaines ou anglo-saxonnes - de l'ensemble des institutions occidentales dans le fond. Ce ne sont pas les institutions israéliennes qui commanderaient de manière cachée et inexplicable, pas davantage que ce sont les dirigeants inquiétants et actuels d'Israël qui seraient les maîtres du monde et de l'Amérique. En réalité, c'est l'inverse qui est vrai : ainsi que l'enseigne la précieuse et dramatique guerre du Liban de 2006, les institutions ne dirigent qu'en apparence et sont manipulées par des factions. Les dirigeants israéliens ne sont au fond que des fantoches comme les autres dirigeants occidentaux et occidentalistes. Ils se tiennent servilement au service d'intérêts factionnels. Seules des factions ont les moyens d'unir conjointement les forces vives d'institutions relevant de différents États.
Seules des factions de la haute finance et de la grande banque possèdent ce pouvoir consternant et destructeur de relier entre eux des institutions dont les intérêts ne sont précisément pas identiques. C'est ainsi que les intérêts américains ne rejoignent pas du tout les intérêts israéliens et que la fable de la philanthropie américaine appliquée à l'État issu de la Shoah ne tient pas la route une seule seconde : si tel était le cas, les Américains s'empresseraient de trouver une solution viable pour le peuple palestinien qui vit un martyr depuis cinquante ans au bas mot.
Le moins qu'on puisse constater est que tel n'est pas le cas. Pis, les Américains poursuivent une politique inexplicable et inexpiable si l'on applique une grille d'interprétation fondée sur leurs intérêts géopolitiques et géostratégiques. Au contraire, la compréhension de la situation inextricable s'éclaire soudain si on lui applique un autre prisme de lecture et si l'on comprend que toutes ces institutions aux intérêts antithétiques travaillent de concert parce qu'elles sont mues par des intérêts factionnels qui divergent des intérêts institutionnels et qui sont plus puissants que les intérêts institutionnels.
Qui a le pouvoir de faire travailler de concert les institutions occidentales alors que leurs intérêts sont si divergents? Certainement pas de simples institutions comme les institutions israéliennes! En plus, il faudrait expliquer pourquoi un État aussi faible et aussi récent, frêle et sans doute éphémère que l'État d'Israël aurait les moyens de dicter sa politique étrangère à l'hyperpuissance américaine. A cause de son pouvoir de persuasion surnaturel ou à cause de ses accointances avec des factions financières qui lui sont favorables?
C'est ici que s'éclaire la prédominance capitale des factions financières : quel est le coeur de ces factions? Sans nul doute il est permis d'affirmer que leur antre se tapit quelque part entre la City de Londres et Wall Street. Cette identité clairement anglo-saxonne, entre Ancien et Nouveau Monde, implique à n'en pas douter l'Empire britannique et ses avatars postmodernes, notamment les mutations économiques dues au néo-colonialisme.
Mais si historiquement il n'est guère étonnant de constater que l'Empire britannique n'a en fait que muté et que la décolonisation s'est transformée en un néo-colonialisme trouvant un prolongement américain à la domination impérialiste britannique, cette donne n'explique toujours pas la présence d'Israël dans ce triptyque impérialiste, d'autant que cet État ne possède aucune richesse de sous-sol ni aucun potentiel sérieux. La puissance d'Israël se manifeste surtout dans le soutien inconditionnel dont le gratifient officiellement les États-Unis, mais aussi l'Occident.
Ce soutien est expliqué officiellement par des préoccupations d'ordre moral, comme si l'Occident, singulièrement les États-Unis, se comportaient de manière morale envers le reste du monde, en particulier quand leurs intérêts sont en jeu. Cette farce de la morale cache en fait que les intérêts qui sont au pouvoir en Occident ne sont nullement transparents, démocratiques, libéraux ou que sais-je. Le pouvoir est en fait assumé clairement et directement par des factions économiques qui dictent la politique occidentale.
Il suffit pour s'assurer de cette évidence de constater que le courant des néoconservateurs qui déferlent sur l'Occident depuis le 911 (ou peu avant), ce courant béni qui a fourni à la France Sarkozy en remplacement de Chirac, se traduit notamment par une proximité et une attention pro-israéliennes tout à fait remarquables. Mais pourquoi les factions financières manifestent-elles un tel intérêt pour la pérennité et l'avenir d'Israël? Sans doute en partie parce que ces élites financière sont en grand partie composées de membres d'origine juive et, dans tous les cas, c'est-à-dire aussi quand ses membres ne sont pas juifs, parce qu'elles sont sionistes.
Mais ce n'est pas tout. Je suis persuadé que le fond de l'affaire est religieux, un peu comme les déclarations des dirigeants actuels américains sont profondément marqués du sceau d'une longue histoire judéo-chrétiennes, marquées par les interprétations hérétiques et simplistes de la Bible. Il est curieux que l'on se moque des dérives, parfois évidentes, de l'islamisme, notamment de sa faiblesse théologique et que l'on ne remarque pas que les dirigeants anglo-saxons sont mus, depuis au moins les Lumières et la naissance du libéralisme, par des conceptions religieuses parfois clairement illuminées et extrémistes.
Il suffit de rappeler les déclarations de Condoleeza Rice après la guerre 2006 du Liban comparant aux affres de l'enfantement les souffrances de la guerre. Cet extrémisme judéo-chrétien a bouclé la boucle en s'alliant objectivement avec la laïcité en tant que sortie fallacieuse et fort religieuse de la religion. Que l'on examine l'état des sociétés occidentales, en particulier de sociétés comme la société israélienne ou la société américaine, et l'on comprendra que coexistent en leur sein l'extrémisme religieux et le dépassement laïc de la religion.
Cette coexistence du fondamentalisme et du dépassement laïc au sein de l'immanentisme est la traduction d'une certaine religiosité, la religion de la crise, la religion immanentiste, et que l'on ne peut comprendre l'alliance contre-nature et paradoxale du fondamentalisme et de l'agnosticisme soi-disant supérieur qu'en réalisant que c'est l'immanentisme qui est la religion des factions financières et que c'est au nom de cet immanentisme que se sont réconciliés les intérêts les plus extrémistes du transcendantalisme moribond, qu'ils soient (au fond peu importe) juif ou chrétien, d'obédience avant tout protestante.

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