samedi 14 février 2009

Caroline Fourest, une critique-pas-veineuse de la critique

Excellent article de Mahler sur le discours des journalistes officiels et cooptés, dont Caroline Fourest est l'emblème avec sa ligne antifanatisme et protolérance.
http://www.alterinfo.net/Caroline-Fourest,-une-critique-pas-haineuse-de-la-critique-des-medias_a29736.html
La ligne théorique de Fourest présente l'insigne avantage d'empêcher toute critique, puisqu'elle est parfaite et inattaquable. Comment ne pas être in abstracto contre le fanatisme ou contre l'intolérance? Fourest se situe sur une ligne démocratique, laïque, tolérante, qui est typiquement la ligne d'un libéral progressiste. N'oublions jamais, même si les lignes politiques ont peu changé depuis les Lumières, que Voltaire était un libéral pur jus et que la filiation dont se réclame Fourest est éclatante. Ajoutons que celui qui se réclame de Voltaire pour mieux le trahir, l'ineffable et inénarrable Valtaire, appartient à la mouvance sécuritaire du libéralisme, soit à une ligne proche du néoconservatisme. En gros, le sécuritarisme libéral se targue de défendre la liberté contre les menées terroristes. Dans ce cas, Fourest est finalement très proche du sécuritarisme avec son discours de la tolérance indéfectiblement attaché aux valeurs occidentales.
Dans l'intervention que relate Mahler sur France Culture, qui devient de plus en plus la version intellectualiste et bobo du discours de propagande journalistique et institutionnel, on peut commencer par observer la dépréciation qualitative abyssale et inquiétante qu'engendre le système de propagande : à force de vendre des fausses idées critiques, soit des idées favorables au pouvoir, on finit par produire des pensées et des penseurs affligeants. De faux penseurs. Nous sommes loin de la vraie réflexion, de la philosophie ou de la religion. Nous sommes dans le règne des experts, dont les journalistes sont le versant informatif.
L'intellectuel s'est commué en journaliste. J'en veux pour preuve la figure d'un Joffrin, ancien coopté de la FAF, comme Colombani, faux gauchiste et vrai bobo, qui ne cesse de pondre des nullités réflexives et qui est sans cesse invité sur les ondes pour nous déballer sa conscience sans science de pacotille. Pire que Jean Daniel, c'est possible, quoique difficile : exemple de Joffrin, l'ancien de Nouvel Obs, désormais attaché aux basques de Libération, le quotidien libertaire qui a fini dans l'ultralibéralisme financier. Libération et Joffrin, finalement, même combat.
Une petite précision : le vrai nom de Joffrin est Mouchard. Cette coïncidence hilarante indique mieux qu'un long discours le lien entre ces journalistes et la propagande qu'ils nous servent comme une sauce indigeste trop lourde.
Quand Fourest intervient, il faut la ressituer au niveau de Joffrin : Fourest est vraiment une propagandiste, qui est démasquée depuis belle lurette comme telle et dont les réactions sont prévisibles. Sa participation à Charlie Hebdo en atteste. Ses envolées contreproductives contre Meyssan également. Récemment, Fourest a dévoilé (c'est le cas de le dire) la nature de son engagement antifondamentaliste, en soutenant l'indéfendable, soit l'agression monstrueuse et criminelle d'Israël contre Gaza. Commencer par défendre les homosexuels et finir par défendre les Israéliens criminels de guerre, faut le faire! Faut se taire?
http://www.agoravox.tv/article.php3?id_article=21755
Fourest aux côtés de Muhlmann, c'était comique : la mauviette foi journalistique additionnée à la mauvaise foi politologique. Deux propagandistes du choc chic au service de leur travestissement de la vérité. Deux sionistes qui se prétendront seulement laïques. Deux occidentalistes qui dévoient l'idéologie sioniste au nom de leur pseudo impartialité antiidéologique. C'est logique. Il ne fallait pas y penser.
Si l'on reprend l'intervention de Fourest sur les ondes salies par tant d'inculture de France Culture, on se rend compte que notre Fourest occidentale culte est emblématique du discours de propagande contemporaine en Occident : en gros, rendre la critique impossible en se réclamant du Bien et de la Vérité. A partir de cette ligne simpliste, les dérapages sont autorisés. Tous les dérapages. En premier lieu, le dérapage numéro un dans le domaine des idées : l'absence d'argumentation.
Pourquoi argumenter si l'on dit la vérité? Pourquoi se justifier si l'on sait que l'on a raison? La ligne de propagande de Fourest implique le formatage le plus violent. L'oraison de la raison. C'est que Fourest est formatée comme rarement on observa formatage. Son formatage implique l'absence de remise en question. Formatage irrationnel au nom de la raison. Déraison au nom de la raison. Il est vrai que l'essence de la propagande implique le formatage.
Fourest ne justifie pas de sa position et ne montre jamais en quoi les critiques qu'elle reçoit ne sont pas fondées ou sont fausses - selon elle. Elle mord en guise de réfutation. Si l'on n'est pas d'accord avec elle, c'est que l'on a tort. Postulat : ceux qui la critiquent ont tort. Conséquence : les critiques de la vérité sont l'incarnation du Mal. Ils sont pêle-mêle antisémites, complotistes, poujadistes, haineux... Sous-entendu : le Bien est du côté du plus fort. On cerne pourquoi Fourest joue l'air de l'écolière modèle comme variante de la perverse ingénue : elle sert un discours oligarchique en guise de propagande.
Quant au critique de Fourest et de la propagande oligarchique : il est haineux s'il s'oppose au discours de la vérité. Il a faux parce qu'il n'est pas du côté du plus fort. Enfin, du plus fort : de celui que Fourest estime le plus fort, parce que manifestement Fourest et tous les occidentalistes atlantistes n'ont pas compris que leur pouvoir s'effondrait, que leur système s'effondrait et qu'ils avaient pariés sur le mauvais cheval. Le bourrin de l'académisme prétentiard et lisse pour Fourest. C'est drôle, les manipulateurs et les arrivistes, parce qu'arrive forcément le moment tordant où ils se manipulent. Le manipulateur manipulé. Mani pulite.
Il sera plus inquiétant d'assister à l'amalgame que Fourest opère, au nom de la lutte contre l'amalgame, entre le discours haineux qu'elle stigmatise et Internet. Internet a ouvert un vent de liberté d'expression dont une Fourest devrait se féliciter. Si l'on est pour la liberté d'expression, on ne peut que se féliciter de l'accroissement de la liberté d'expression...
Pas du tout, car cette liberté d'expression s'exerce contre les méthodes orwelliennes de censure et de propagande au nom de la tolérance et la liberté, dont Fourest est le suppôt diabolique et revendiqué (avec un simplisme à faire pâlir d'envie tous les propagandistes). Toute personne saine face à la critique répond. Fourest non. Elle devrait se demander pourquoi elle suscite tant de critiques et pourquoi la liberté d'expression d'Internet se retourne contre elle, l'hypertolérante et hyperlibertaire new wave... Si on la critique, c'est qu'on a tort, c'est qu'on est méchant, c'est qu'on est vilain. C'est qu'on est antisémite, complotiste, haineux... Homophobe? En se positionnant contre la critique sur Internet et en réclamant qu'Internet remplisse des fonctions que l'on puisse encadrer et formater, Fourest montre clairement qu'elle dispense un discours de censure, un discours liberticide au nom de la liberté.
Propagande et censure sont les mamelles de la luxure. Si l'on veut s'aviser du vide sidérant de la pensée de Fourest (je m'excuse d'utiliser ce terme pour une production aussi affligeante), que l'on considère le fondement à partir duquel Fourest bâtit ses théories. Le socle est édifiant : ceux qui sont du côté du pouvoir occidental, ceux qui sont du côté des institutions occidentales, ceux qui sont des journalistes officiels et des propagandistes officieux, ont raison, parce qu'ils ont raison. Triste oraison.
En filigrane, on sent poindre un argument typiquement oligarchique : c'est que les bons intellectuels, soit les intellectuels du côté de l'officiel du moment, disposent et bénéficient de qualités qui leur permettent justement de s'élever au-dessus de la masse des critiques nauséabondes, haineuses et médiocres d'Internet. L'officiel est la supériorité. L'officiel hait la supériorité? Les seules critiques admissibles et admises sont ainsi des critiques factuelles et ponctuelles qui se contentent de pointer des erreurs sporadiques et qui valident du coup le discours - et la supériorité du discours officiel. CQFD.
Face au constat de la nullité de ces impensées, Fourest, Venner, Val, Enthoven, toute la clique de Charlie Hebdo, du Monde, de Libé, du Nouvel Obs, de l'Express (une pensée pour le remarquable ami d'Enthoven Jr., Christophe Barbier le Juste de Gaza), il faut espérer que ces censeurs et propagandistes ne viendront pas à bout de la liberté certaine dont jouit Internet et ne parviendront pas à imposer leur formatage et leurs fromages de renards faméliques.
J'oserai une hypothèse sur le cas Fourest. Le parcours Fourest, de Prochoix à Charlie le Retour. Fourest ne fait pas mystère de son homosexualité. D'où vient que Fourest la propagandiste sorte avec Venner la propagandiste? Curieux mariage d'un seul et même genre, que je n'oserai baptiser de genre homosexuel. Venner a commis un ouvrage de propagande sur le cas Meyssan, accusé de tous les maux parce qu'il a osé prétendre que l'avion de la version officielle n'a pu s'écraser sur le Pentagone le triste jour du 911. Venner réussit l'exploit de postuler que Meyssan est un imposteur sans jamais revenir sur les propos en question de Meyssan et sans jamais démontrer en quoi Meyssan affabule. Venner devrait piger pour Rue 89, l'émanation Internet de la propagande néo-Libé et les spécialistes pour en guise de démonstration répéter servilement la ligne officielle. Sacrée démonstration que la répétition servile et moutonnière!
Comment peut-on arriver à faire ce métier aussi dégradant de propagandiste et de menteur au service de la mauvaise foi? Sans doute les explications sont-elle plurielles, complexes et variées. Dans le cas de Fourest, je me demande si ses discours de défense des homosexualités, au nom du refus de l'homophobie, ne l'ont pas amenée à se décentrer idéologiquement, à entériner des discours faussement marginaux et vraiment conformistes, qui tendent à rapporter l'homosexualité à des questions seulement sociales, comme les études queers de mode anglo-saxonne.
Sous prétexte de verser dans l'analyse de l'homophobie, Fourest a initié son parcours de propagnadiste en accréditant des thèses simplistes et aberrantes. Cet exercice de pensée autre, différente, aux marges, pas comme les autres (soi-disant), l'a amenée à estimer que le fait de penser étrangement impliquait que l'on pense bien. La vraie pensée, le bien et la vérité se situaient du côté de l'étrange (étymologie de queer)!
Et puis, il a fallu lutter contre les condamnations de l'homosexualité et des différences sexuelles. Dans ce combat, on commence forcément par s'en prendre aux religions instituées. Cas de l'Eglise catholique. Cas de l'Islam patriarcal. Et puis on en vient à comprendre que c'est dans l'espace de la laïcité que les droits des homosexuels sont le plus garantis. Et puis l'on en arrive à exiger les mêmes droits pour les minorités sexuelles et pour la majorité. Et puis l'on finit par exiger que toutes les sexualités aient accès au mode de vie libéral et occidental, soit aux droits bourgeois, atlantistes et démocratiques.
On commence à déraper sévèrement. Et puis on estime que le régime qui défend le plus les minorités sexuelles est le régime le plus juste. On a dérapé vraiment à partir de ce moment précis. Et puis on se met à défendre l'atlantisme sous prétexte que c'est le régime le plus juste. On devient spécialiste de la laïcité, de la démocratie, du libéralsime, de l'atlantisme, du sionisme, à partir d'un combat initial pour la tolérance envers les minorités sexuelles.
Il est où, le lien? T'as dérapé grave et t'es fier de ta descente aux Enfers! T'es passée de l'exigence de tolérance à l'intolérance propagandiste au nom de la tolérance. T'es à côté de tes pompes et tu nous pompes l'air. Sévère. Caroline, tu est lasse de pique. Le joker du Bien. T'as égaré carrément tes pompes en chemin. En attendant que tu contemples un jour ton reflet dans le miroir de ton égarement, j'attends ta prochaine intervention avec un petit sourire : l'avantage avec les propagandistes qui sont en décalage avec le reél parce qu'ils essaiment le Bien, c'est qu'ils sont drôles. BHL est drôle. Pipes est drôle. T'es très drôle, Caroline. Vraiment drôle dans ton rôle de troll. Sur mesure.



http://www.alterinfo.net/Caroline-Fourest,-une-critique-pas-haineuse-de-la-critique-des-medias_a29736.html

"
Caroline Fourest, une critique-pas-haineuse de la critique des médias

Le vendredi 30 janvier 2009, l’émission « Les Matins » sur France Culture avait pour invité Laurent Joffrin, dont le livre est un chef d’œuvre culturel tellement « incontournable » que nous en reparlerons … et que France Culture se devait de dérouler un tapis rouge tourné vers l’Académie de sciences morales et politiques. Car Laurent Joffrin y siègera sans doute bientôt.

Pendant plus d’une heure, le néant critique put s’exhiber tout à loisir, grâce aux contributions d’Ali Baddou, d’Alain-Gérard Slama, de Marc Kravetz et… de Caroline Fourest. Pour célébrer un genre à la mode : la critique-pas-haineuse de la critique des médias et la dénonciation par amalgame. Temps d’arrêt sur la chronique de Caroline Fourest.

Avant même que le héros du jour ne fasse son entrée en scène sur le plateau de l’émission, Caroline Fourest [1], l’honore : « "Médias paranoïa", le livre de Laurent Joffrin met le doigt sur un phénomène que connaissent tous les journalistes. » L’honore et surenchérit.

La rhétorique est toujours la même : décréter que la critique des médias - quand elle n’émane pas de leurs tenanciers ou de leurs hôtes attitrés, quand elle descend dans l’arène au lieu de se réfugier dans les médias dominants ou les colloques académiques - relève de la haine. La suite coule de cette source : tous poujadistes et complotistes, à la façon des racistes et des antisémites.

Il est toujours plaisant d’écouter les défenseurs de la nuance et de la complexité se livrer avec délice aux amalgames qui les répugnent, du moins quand ils croient en être les victimes.

Sus aux poujadistes

« Dans la famille des derniers poujadismes en vogue, la haine des médias et le système médiatique semble devoir jouer le même rôle que la haine du lobby judéo-maçonnique, la focalisation sur l’immigration… ». La haine, donc. Et rien d’autre. Une haine qui équivaut à l’antisémitisme et au racisme. Rien que ça. Puisqu’elle joue le même rôle. Quel rôle ? « celui du bouc émissaire » [2]. De quoi les médias sont-ils le bouc émissaire ? Ce n’est pas ici que nous l’apprendrons.

Ainsi, les médias et les journalistes, selon Caroline Fourest, seraient l’objet d’une haine qui les englobe tous et qui est semblable à toutes les haines antisémites, xénophobes ou racistes : « De même que les juifs seraient obsédés par l’argent, les musulmans terroristes, les arabes voleurs, les noirs fainéants, les médias seraient tous un peu sionistes, un peu manipulateurs et vendus au pouvoir. » La comparaison est d’autant plus suggestive qu’elle est insistante. Et elle laisse de plus en plus clairement entendre, mais sans le dire, que ceux qui critiquent les médias sont tous « un peu » antisémites. Une calomnie par sous-entendu qui n’est pas moins « en vogue » que sa version explicite…

« Qu’importe, poursuit Caroline Fourest, qu’il existe plusieurs façons d’exercer le journalisme que de journalistes, qu’ils aient des opinions très différentes sur le conflit israélo-palestinien, qu’ils soient parfois proches du pouvoir et parfois franchement anti-sarkozystes, qu’importe. » Qu’importe particulièrement qu’il existe plusieurs façons de pratiquer la critique des médias…

Dans la série des dernières imbécillités en vogue, il convient d’ajouter, sans transition, que ces poujadistes haineux sont complotistes. En quoi, pourquoi, comment ? Qu’importe : « Le propre d’une pensée complotiste est l’absence délibérée de discernement et de raisonnement, le réflexe, l’amalgame, le préjugé remplacent l’analyse. » Et l’analyse dénuée de tout préjugé et exempte de tout amalgame, c’est évidemment celle que l’on peut découvrir en écoutant et en lisant la critique de la critique des médias en version Fourest ! Comme le montre sa chronique.

« Cette caricature, insiste Caroline Fourest qui vient de la dessiner à gros traits, est par essence l’ennemi de tout travail journalistique ; elle fait logiquement bondir tout journaliste un tant soit peu amoureux de son métier et donc attaché à la précision. » A preuve, ce que dit Caroline Fourest qui permet elle-même d’admirer à quel point elle est « attachée à la précision » [3] .

Sus aux internautes

Peu à peu se découvre cet ennemi invisible et omniprésent traquant les journalistes comme les racistes et les antisémites haïssent les noirs, les arabes et les juifs : c’est l’internaute. Une seule personne aux mille visages : « Quoi qu’on fasse, quoiqu’on dise, il y aura toujours quelqu’un sur Internet pour vous aligner. […] » Jusqu’alors, il est vrai, la presse imprimée et les chroniqueurs tous médias détenaient une sorte de monopole…

Qu’importe s’il y a aussi sur Internet d’autres intervenants que des « snippers » et d’autres interventions que de simples « coups de fusil » : Caroline Fourest a retenu la leçon de Philippe Val, pour qui Internet est le territoire exclusif des « paranoïaques » et des « délateurs » [4] Et qu’importe si les journalistes ne sont pas – et de loin – les seules et les principales cibles des criailleries anonymes qui parsèment les forums sur Internet Car c’est bien de ces forums qu’il s’agit finalement, sans que rien dans le début de la philippique généreuse en amalgames ne nous ait prévenus.

Le cauchemar de Caroline Fourest ? Les multiples visages de « on » : « Si vous parlez sans détour, on vous accuse d’être prétentieux. Si vous prenez des précautions, vous êtes une chiffe-molle. Si vous traitez uniquement du sujet qui est votre spécialité, on vous accuse d’être obsédé. Si vous équilibrez, on vous soupçonne de ruse. Bref, rien n’est simple. »

Ces internautes, haineux poujadistes, et semblables aux antisémites et aux racistes sont évidemment tous des imbéciles qui menacent d’anéantir la culture et les libres méditations des chroniqueurs en charge de sa protection.

Caroline Fourest : « Il y a des moments où on se prend à regretter le temps où il fallait au moins prendre sa plume, rédiger une lettre, payer un timbre et aller à la poste pour vous donner des leçons, ne serait-ce que pour avoir le plaisir de lire des choses plus argumentées. » Ah, heureux temps du « courrier des lecteurs » que l’on pouvait tranquillement laisser sans réponse et jeter à la poubelle ! Désormais, le temps est compté : c’est à peine si Caroline Fourest peut s’accorder « le plaisir de lire des choses plus argumentées »… comme les publications de notre association.

Et Caroline Fourest de défendre « le journaliste » contre « l’internaute », confondu avec l’auteur anonyme qui n’interviendrait dans les forums que pour dire n’importe quoi n’importe comment, sans laisser la possibilité au premier de lui répondre. Toujours le même « souci de la précision » [5].

Vive nous !

Une fois prononcé l’essentiel du réquisitoire, il faut bien introduire une nuance et ménager une concession.

Voici la nuance : « La propension peut-être de finir par haïr l’interactivité et l’outil web lui-même : ce serait pourtant commettre la même erreur que ceux qui croient vraiment pouvoir enfermer tous les journalistes dans le mot média. Alors qu’il existe parfois des miracles, des commentaires constructifs qui vous signalent une erreur ou qui vous mettent sur une piste et contribuent à ouvrir votre horizon de journaliste. Le propre du journaliste c’est d’avoir le cuir assez épais pour discerner le commentaire imbécile de l’alerte utile. » Le cercle de la critique légitime à peine entrouvert se referme aussitôt : puisque la seule critique admissible doit être « constructive » et que seuls les journalistes peuvent lui accorder les brevets d’intelligence et d’utilité.

Et voici la concession : « Par exemple, à propos du débat sur le traité constitutionnel. Il faut bien l’admettre que beaucoup de journalistes effarés par les arguments populistes et démagogiques de certains partisans du "non" ont eu tendance à minimiser les arguments plus rationnels ou justifiés. Dans ces cas-là, le Net peut servir d’alerte ou de grand défouloir. » Dans l’énoncé de cette très timide autocritique, est comprise sa limite. Une double limite, en vérité. D’abord parce que l’emportement de « beaucoup de journalistes » est justifié dans sa présentation même : ils étaient « effarés par les arguments populistes et démagogiques ». Ensuite et surtout parce que les arguments rationnels, quand ils s’exposent sur le Net, n’ont qu’une fonction d’ « alerte » et de « défouloir » : il revient encore et toujours aux journalistes et à eux seuls de distinguer ce qui est rationnel et ce qui ne l’est pas…

… Sur France Culture par exemple, où il est rationnel de présenter ceux qui critiquent les médias et les journalistes sans avoir reçu l’autorisation préalable des professionnels de la profession comme un ramassis de poujadistes haineux et complotistes, à la façon des antisémites et des racistes.

Tout cela avant qu’entre en scène, au cours de la même émission, l’un des plus grands spécialistes de la dénonciation par amalgame : Laurent Joffrin.

Henri Maler

Notes

[1] Egalement journaliste à Charlie Hebdo, éditorialiste au Monde et cofondatrice de la revue ProChoix.

[2] Passons sur un détail : il faut sans doute comprendre que la haine transforme son objet en bouc émissaire.

[3] Et ce serait cet amour du métier et ce souci de la précision qui expliqueraient que « des » journalistes résistent : « C’est ce qui explique pourquoi des journalistes, sous opinions par ailleurs très variées, voire opposées, peuvent se retrouver dans l’allergie à la pensée bouc émissaire en vogue sur Internet. » Dans l’allergie à la pensée bouc émissaire ou dans le refus de toute critique… animée par le souci de la précision ?

[4] Dans l’édito paru dans Charlie Hebdo le 10 janvier 2001 : « A part ceux qui ne l’utilisent (Internet) que pour bander, gagner en bourse et échanger du courrier électronique, qui est prêt à dépenser de l’argent à fonds perdus pour avoir son petit site personnel ? Des tarés, des maniaques, des fanatiques, des mégalomanes, des paranoïaques, des nazis, des délateurs, qui trouvent là un moyen de diffuser mondialement leurs délires, leurs haines, ou leurs obsessions. Internet, c’est la Kommandantur du monde ultralibéral. C’est là où, sans preuve, anonymement, sous pseudonyme, on diffame, on fait naître des rumeurs, on dénonce sans aucun contrôle et en toute impunité. Vivre sous l’Occupation devait être un cauchemar. On pouvait se faire arrêter à tout moment sur dénonciation d’un voisin qui avait envoyé une lettre anonyme à la Gestapo. Internet offre à tous les collabos de la planète la jouissance impunie de faire payer aux autres leur impuissance et leur médiocrité. C’est la réalité inespérée d’un rêve pour toutes les dictatures de l’avenir. »

[5] « Aujourd’hui, dit-elle, l’internaute possède sur le journaliste un avantage qui ne sert pas forcément le débat public, en un clic anonyme, le moindre redresseur de torts peut mentir, tronquer et insulter sans avoir à se justifier. » Comme si les journalistes étaient les seuls à payer le prix d’un accès libre à des « forums » qui servent trop souvent de crachoirs. Comme si, surtout, on ne trouvait pas en grand nombre sur les forums des critiques justifiées, sans mensonges, ni citations tronquées, ni insultes. Seulement voilà : le « souci de la précision »…


Jeudi 12 Février 2009

Aucun commentaire: