jeudi 3 septembre 2009

Le péril oligarchique

Pour ceux qui ne comprennent pas les récentes annonces à propos de la dislocation des États-Unis, des prédictions économiques qui s'appuient sur des faits irréfutables, comme celle qui suit :
http://www.alterinfo.net/Effondrement-des-USA-dans-2-mois_a36228.html
pour ceux qui veulent cependant comprendre, que l'on saisisse bien les attentes qui se tapissent derrière des appellations contrôlées, brevetées et longtemps déniées comme le Nouvel Ordre Mondial. Il ne s'agit pas d'opérer une destruction totale, une néantisation absolue et définitive qui retentirait comme un cataclysme. L'effondrement de l'Occident est le résultat d'un long processus d'impérialisme, selon lequel l'impérialisme est le cycle qui finit inévitablement par s'autodétruire après avoir détruit. Les gens se moquent des prévisions de type apocalyptique en haussant les épaules : la fin du monde, bonnes gens, ce n'est pas pour maintenant!
S'il est impossible de prévoir la disparition de l'homme, ne serait-ce que parce qu'elle est inconcevable pour l'homme, ou parce que l'homme se figure en éternel dinosaure, il est tout à fait possible de comprendre que l'apocalypse du Nouvel Ordre Mondial ne désigne pas la disparition subite, voire instantanée de l'homme. Pour le dire en deux mots, il ne s'agit pas de se réveiller un mardi matin, tout va très bien Madame la Marquise, avant de constater effaré et hébété que le lendemain, il n'est plus rien - sauf soi-même l'observateur miraculé et suspect.
On ne passera pas du quelque chose au rien en une fraction de seconde. Ce n'est pas instantanément que s'opèrera la destruction du système - d'autant que le système qui s'écroule est unique. Par contre, il est ahurissant de constater que les populations occidentalistes légitiment les mesures destructrices qui les détruisent, comme les taxes pseudo-écologiques ou les mesures de réduction draconiennes des services de santé. Cette réaction résignée résulte d'une incompréhension radicale du processus de destruction qu'on projette sur d'autres phénomènes (naturels et inhumains) alors qu'il émane avant tout de soi (l'Occidental).
Pour se rassurer, on définit la destruction comme instantanée et l'on en déduit que si les choses roulent tant bien que mal sur quelques ans, c'est la preuve qu'aucune destruction n'est possible - en tout cas effective. Cette conception du réel révèle un nihilisme acharné, palpable dans l'immanentisme moderne, selon lequel la différence n'existe pas - elle est remplacée par le néant. Ce refus du changement se manifeste notamment dans la conception du Libéralisme Éternel, alors que l'histoire du libéralisme remonte au mieux à la Renaissance - pas avant.
Quand on comprend que le phénomène de destruction ne peut être que progressif, sauf dans les cas de cataclysmes naturels ou ultraviolents (genre bombe atomique), on cerne mieux quel type de destruction nous sommes en train de connaître. En gros, nous sommes passés de sociétés qui vivaient sous un régime démocratique mitigé à des sociétés purement immanentistes.
En politique, l'application ontologique du nihilisme renvoie à l'oligarchie. Dans les temps qui ont suivi les Lumières et les Révolutions d'Occident, les sociétés qui se sont mises en place ont suivi un développement typiquement immanentiste, avec une forte touche de démocratie et de républicanisme. Il s'agissait bel et bien de régimes impérialistes et coloniaux, mais à l'intérieur de ces régimes coexistait la tentative d'accorder la prééminence à l'amélioration des conditions d'existence.
Précision d'importance : dans une mentalité immanentiste comme celle qui se met en place à partir des Lumières, la prédominance des valeurs est accordée au sensible, à ce que Nietzsche appelait les apparences. Cette conception dénote un républicanisme de type immanentiste. Le facteur oligarchique est l'ingrédient principal de ce républicanisme ambivalent : en effet, de même que la démocratie athénienne fonctionnait sur l'intégration des esclaves et des métèques à la société des hommes libres, de même les démocraties libérales occidentales n'ont pu s'agrandir qu'en développant le système colonialiste et impérialiste.
On glose souvent sur les vertus de la société de marché, qui serait indissociable de la démocratie. Outre que cette compréhension est obtuse et fausse, elle fait fi de l'évidence historique : la prééminence de l'oligarchie dans la tambouille libérale. Au moment où l'oligarchie est en train de triompher purement et simplement, où moment où les facteurs qui encadraient l'oligarchie sont en train de disparaître des sociétés démocratiques libérales d'Occident, il est temps de rappeler que cette sacrosainte liberté (chérie) ne s'est jamais développée qu'en Occident. La démocratie à l'intérieur des terres occidentales n'a été compatible qu'avec la prédation oligarchique à l'extérieur, notamment sur les terres asservies à l'impérialisme occidentaliste.
Cette dimension de la démocratie libérale la rend de fait plus oligarchique que républicaine. Par ailleurs, les affirmations optimistes sur l'extension de la démocratie libérale, son progrès et sa facultés à gagner l'ensemble de l'humanité, sans seulement demeurer circonscrite à une partie de l'Occident, ressortissent désormais des techniques de propagande les plus évidentes. L'on appris qu'un Revel en France, grand propagateur de ce type d'arguties, était un agent stipendié des cerces atlantistes les plus virulents (ultralibéralisme et mondialisation au prévu programme).
Si l'on ressitue ce processus de l'immanentisme, on comprend que l'avènement du NOM, qui est présenté comme un espoir incommensurable pour l'humanité, signifie en fait que le processus immanentiste est entré dans sa phase terminale de destruction effective. Il ne s'agit pas de querelles de chiffres ou de partisaneries puériles. Il est irréfutable que la crise économico-financière actuelle est insoluble et que toutes les annonces de reprise sont des Arlésiennes aux lendemains amers.
Dès lors, vers quel type de société se dirige-t-on? Vers des sociétés oligarchiques. C'est-à-dire des sociétés inégalitaires où une petite minorité dirigera politiquement et possèdera économiquement l'insigne part des richesses, tandis que la majorité asservie, manipulée et croulera sous le poids de la pauvreté et de la souffrance. Si l'on pense que j'exagère, que l'on tourne son regard principalement vers deux types de sociétés :
1) les sociétés africaines;
2) la société chinoise.
Dans les sociétés postcoloniales africaines, le colonialisme économique ayant succédé au colonialisme politique prédomine. Dans la société chinoise, l'alliance du capitalisme le plus sauvage avec le dirigisme d'État montre vers quel type de société se dirigent les sociétés postlibérales, une fois que l'on a compris que le libéralisme est mort - symboliquement en 2009, soit vingt ans après la chute du Mur de Berlin.
La société chinoise condense idéalement le libéralisme et le communisme, soit les deux versants idéologiques de l'immanentisme tardif et dégénéré, Adam Groucho Smith et Marx, étant entendu que l'entreprise de mutation ontologique, notamment personnifiée par la folie Nietzsche, a échoué irrémédiablement dans les délires politiques les plus controuvés. La liberté libérale additionnée au dirigisme d'État communiste permet d'ôter du communisme l'idée d'intérêt général de l'État et du libéralisme l'individualisme forcené.
L'intérêt général est remplacé par le profit oligarchique de quelques familles. C'est en quoi le modèle chinois fascine les adeptes du NOM : il leur montre que politiquement et historiquement, l'adaptation des sociétés collectivistes communistes à l'idéal oligarchique est compatible. Au final, si l'on veut comprendre vers quel type de société se dirige l'Occident, une fois qu'on a mesuré que l'effondrement systémique menait à une diminution drastique du niveau de vie occidental et à une indexation du niveau de vie des populations occidentales au niveau de vie des populations victimes de l'oligarchie occidentale, soit le reste du monde, il faut au préalable rappeler que l'Occident a connu les prémisses de l'expérience de la baisse du niveau de vie après le choc pétrolier du début des années 70.
La sortie des États-Unis des accords de Bretton Woods en 1973, sous la houlette de George Shultz, qui se matérialise par la dématérialisation du dollar, soit la fin de l'indexation du dollar (monnaie de référence internationale) à l'étalon-or, marque le début de la fin des Trente glorieuses, soit de la fin de la prospérité libérale pour les sociétés qui profitent du système oligarchique. Ces sociétés connaissent un premier effondrement qui se caractérise par la baisse irréfutable du niveau de vie, depuis les années 70 jusqu'à maintenant.
Sans entrer dans les détails qui noient le poisson, c'est-à-dire qui divertissent de l'essentiel, il convient de noter que le système immanentiste en crise est un système au fonctionnement matériel. Il est normal et prévisible que ce soit les indices de la prospérité matérielle qui retranscrivent cette crise. Maintenant, l'effondrement systémique occidentalistes induit que les sociétés privilégiées connaissent le même destin funeste que les sociétés victimes. Au final, c'est à l'Afrique que l'on revient coûte que coûte.
Que l'on soit persuadé que c'est en Afrique que se situe le destin du réveil humain, de la prospérité et de la grandeur de l'avenir - ou que l'on défende les intérêts mondialistes et oligarchiques qui enserrent de leur gangue mortifère l'évolution humaine, bloquée inextricablement au stade pervers et injuste de la mondialisation nihiliste; dans les deux cas opposés, on en revient à l'Afrique. L'étude des sociétés africaines contemporaines donne le meilleur aperçu de ce que serait l'Occident si le projet du NOM parvenait à ses fins.
NOM : Nouvelle Oligarchie Mondiale, dans laquelle s'opposeraient deux castes schématiques : la caste des dominateurs, ultra minoritaires et ultra dominateurs; la caste des dominés, ultra majoritaires et ultra manipulés. Cette simplification extrême et radicale du système des castes de type hindou prétend se référer à l'expérience atavique des sociétés et de leur fonctionnement politique. L'argument-massue pour légitimer l'inégalitarisme oligarchique est des plus faciles : ce qui a fonctionné fonctionnera.
La mentalité oligarchique considère que les régimes républicains sont l'exception, spécifiquement les régimes démocrates, et que l'essentiel de l'histoire humaine fonctionne sous modèle impérialiste. Les oligarques sont persuadés que le régime oligarchique est la règle commune et que le régime républicain est l'exception - à bannir.
Le grand modèle de ces individus reste l'Empire romain, en tant que Rome est le symbole de la puissance occidentaliste. Seul petit hic ad hoc : les partisans de l'oligarchie moderne, qui prend le nom de NOM ou d'ultralibéralisme (néolibéralisme pour la variante), ont simplifié le système des castes hindoues sans se rendre compte de la fausseté de leur équilibre. Pour revenir en arrière, soit du monothéisme vers le polythéisme, mission impossible!
La seule possibilité pour sortir de l'ornière immanentiste, soit du nihilisme moderne, est de trouver un mode de succession au transcendantalisme. Dans la spécificité du processus immanentiste, la destruction mène à l'élimination progressive et définitive des différences immanentistes. C'est ainsi que les multiples immanentismes issus des Lumières (et avant de l'humanisme) se sont réduits comme peau de chagrin jusqu'à n'être plus que deux au stade de l'immanentisme tardif et dégénéré (dix-neuvième siècle environ).
Relisez la peau de chagrin : à la fin de l'histoire, quand la peau se contracte jusqu'à se dissoudre, le héros meurt. Au stade du dualisme, le collectivisme s'oppose au libéralisme - le progressisme au pragmatisme. Pour que l'immanentisme perdure ou se révèle viable, il aurait fallu que l'immanentisme soit capable de progrès. Quand on en arrive au stade tardif et dégénéré de l'immanentisme, il est déjà trop tard.
Le prophète Nieztsche, qui est bien un dionysiaque par sa folie exacerbée et maléfique, avait cerné le problème en proposant en lieu et place du progrès dans ce réel-là, de type sensible, une mutation de ce sensible vers l'Hyperréel, enfin compatible avec la mort de Dieu et les aspirations de l'homme à remplacer efficacement Dieu. Quand l'alternative progressiste s'effondre en premier, ce qui était prévisible, puisqu'elle impliquait la réussite du changement impossible, l'immanentisme atteint son stade terminal en plein triomphe.
Il pérore qu'il est arrivé à la fin de l'histoire - c'est le cas de le dire : son agonie se présente comme l'incarnation de la réussite la plus sublime. Que dirait-on si un cancéreux de phase terminale vous expliquait que jamais il ne s'est senti aussi bien et qu'il est parti pour une seconde jeunesse? C'est ce qui se produit avec l'immanentisme terminal, qui est désormais connecté sur le mode unique/agonique avec une fierté grandiloquente et cocasse.
C'est ainsi que nous subissons jusqu'à satiété des discours alambiqués et propagandistes sur le triomphe du libéralisme, sur la fin de l'histoire, ce qui revient à sous-entendre que le libéralisme a dépassé l'hégélianisme et qu'il constitue le triomphe de la raison. On peut tout aussi bien ajouter les gloses extatiques sur les mutations du libéralisme en néolibéralisme ou ultralibéralisme, le remplacement du réel par le désir (l'annonce fantasmatique de la reprise de la crise se fonde sur ce mode). Ce qu'il faut comprendre, c'est que le processus de globalisation qu'on nomme mondialisation est l'expression nominale et explicite de cette unicisation réductrice et destructrice.
Dans tous les cas, l'unicité de l'immanentisme terminal de type pragmatique coïncide avec son triomphalisme moribond. Nous en sommes à un stade où l'effondrement de l'immanent est imminent et où les sociétés occidentales favorisées par la conjonction de l'oligarchie et de la démocratie libérale vont connaître le même sort que les sociétés dominées et colonisées par leur impérialisme. Les populations occidentales n'ont plus conscience de ce qui se produit. Elles vivent dans une hébétude qui s'apparente à de l'inconséquence et qui évoque tristement les émerveillements de l'enfant gâté face au jouet qu'il vient de casser et que ses parents vont lui remplacer - d'office.
L'Américain LaRouche a résumé de manière pertinente et peut-être un peu polémique, voire outrée, cet état de faits dans une récente déclaration :
http://www.solidariteetprogres.org/article5761.html
Les populations occidentales accepteront-elles le sort des populations qu'elles ont opprimées par le passé par leur colonialisme et leur impérialisme - la domination outrageante que leur conférait leur supériorité technique et scientifique? Le seul espoir réside dans le fait que la transposition historique d'un état de fait passé vers un état futur est rigoureusement impossible. Outre l'évolution de l'Inde antique à l'Occident d'aujourd'hui, cette conception empreinte d'un racisme occidentaliste, qu'un Hegel a exprimée dans ses écrits sur les pérégrinations de la Raison dans l'histoire, omet de considérer un fait capital : les régimes oligarchiques et impérialistes détruisent férocement.
Quand ils sont adossés à des religions solides, ils tiennent un certain temps, comme c'est le cas de l'Empire romain ou de l'empire perse. Il arrive que les régimes oligarchiques se succèdent sur fond de religion identique, comme c'est presque le cas avec l'hindouisme. Tant que les régimes politiques sont pluriels, l'effondrement d'un régime n'entraîne pas la chute des autres régimes, soit la chute de l'homme. Alors qu'avec l'unicisation baptisée mondialisation, l'effondrement du régime oligarchique unique pose crument et directement le problème de la survie de l'espèce humaine.
Pas le spectre du cataclysme en une heure, ce qui serait envisageable avec une comète ou une catastrophe naturelle. Pas non plus une attaque nucléaire intentée par un dictateur maboul, comme on nous en serina le danger improbable avec feu Saddam Hussein, un ancien agent des Occidentaux dans sa région, sans doute un satrape violent et brutal, mais guère plus dangereux qu'un potentat local et mégalomane, longtemps soutenu par ses mentors impérialistes, puis soudain lâché par eux pour les mêmes raisons inavouables.
Toutes les menaces de ce type, en particulier la menace écologique, sont instrumentalisées par les oligarques à des fins malthusiennes. La vraie menace pour l'homme est la cause de l'eugénisme : non pas les périls écologique, nucléaire ou cataclysmique, mais le vrai péril - oligarchique. Disparition progressive et non brutale. Disparition non consciente. Les oligarques n'ont pas conscience qu'ils mènent l'humanité vers la destruction. Ils veulent réduire la population mondiale et surfer sur la vague de la décroissance et de la mauvaise conscience écologique pour expliquer que les hommes sont trop nombreux.
Le nihilisme est religion du déni - l'immanentisme moderne ne fait pas exception. Quand on est nihiliste, on n'en a pas conscience explicite - ou alors de manière minoritaire et totalement individualiste. Encore se montre-t-on inconséquent, à l'instar d'un Cioran ou, de manière plus cocasse et inquiétante, de son complice le psychanalyste amateur de jeunes adolescentes asiatiques Roland Jaccard.
Si vous rêvez d'un projet oligarchique qui passe par l'effondrement du niveau de vie imminent et inéluctable, la refonte des États-nations modernes en fédérations d'inspiration oligarchique, enfin la disparition humaine sur fond de désespoir et d'enfermement mental, d'absence de sens et de technologies délirantes (d'autant plus que l'homme se sera enfermé sur sa terre), poursuivez dans ce sens. Il est certain que vous parviendrez à vos fins - nihilistes. Si vous attendez au contraire que l'homme poursuive son aventure, qui s'est toujours caractérisée par la conquête et par l'évolution vers la domination de son environnement, visez l'espace.
Autant le nihilisme et l'oligarchisme enferment l'homme sur Terre, dans le projet bloqué et borné de la mondialisation finale et finaliste, autant le véritable amour de l'homme, qui ne passe par par le retour à l'humanisme, mais par l'avènement de nouvelles formes religieuses, appelle l'espace. Seul l'espace sauvera l'espèce. Quant à l'oligarchie, elle détruirait l'espèce pour des espèces : sans valeur et sans teneur.

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