dimanche 10 janvier 2010

A votre santé

http://www.bastamag.net/spip.php?article805



Selon cet article, on assiste au démantèlement programmatique, sinon programmé, des services de santé. Services de santé institutionnels et étatiques qui assurent la communauté de la solidarité et de la générosité - de la charité. Qui s'échine à démanteler les services de santé? Des cabinets de stratégie, d'analyse et de droit au service des élites oligarchiques concernées par le secteur de la santé. On commence par bosser au service des groupes de laboratoires et autres industries médicamenteuses, puis on se rend compte bien vite que tous les secteurs industriels et financiers sont concernés par cette logique de l'oligarchisation de la santé.
Au passage, il est important de constater le rôle primordial de ces cabinets d'intrigues qui ont pris la place des boudoirs et des alcôves de l'Ancien Régime. C'est dans ces cabinets que les cercles oligarchiques recrutent leurs stratèges, leurs prévisionnistes et leurs analystes. En France, un porte-parole de ces milieux est l'ineffable Baverez (cabinet Gibson, Dunn & Crutcher LLP), selon qui la diminution du temps de travail aboutit inévitablement et tragiquement pour le petit peuple à une augmentation de l'alcoolisme et des violences conjugales. Ergo...
Il est vital (pour l'homme) de connecter les velléités ultra-libérales de démantèlement de la santé avec la mentalité oligarchique qui a compris que l'effondrement inévitable du système de domination impliquait la mise en place de programmes malthusiens pour mieux contrôler la domination par temps de crise, soit par temps de dégringolade. Au passage, on notera le lien pour le moins frappant entre malthusianisme et décroissance. C'est une correspondance troublante et terrifiante, car d'ordinaire on présente les adeptes de la décroissance comme les opposants au système dominant, comme ceux qui veulent enfin rationaliser le système politique et économique, le capitalisme, le libéralisme...
En réalité, les décroissants sont les idiots utiles et les promus opposants des malthusiens explicites - qui pensent aux sévices des cercles oligarchiques. On a les opposants qu'on peut, mon Prince! Les décroissants sont les opposants des croissants une fois que l'on a compris que la croissance en crise menait vers la décroissance et la croissance malthusienne. Le démantèlement de la santé est un point cardinal du malthusianisme en ce qu'il permet de détruire les États-nations nés de la Paix de Westphalie et les digues antioligarchiques et républicaines.
Au fait, si l'on en croit le sociologue Alphonse d'Houtaud, que veut dire santé? La santé renvoie au salut. La santé est ce qui sauve. Détruire la santé est ainsi détruire ce qui sauve. Détruire le salut. Je sais bien que quand on analyse sérieusement et lucidement ce qui signifient décroissance et malthusianisme, on arrive à la conclusion que leurs zélateurs complémentaires et antagonistes sont favorables à la destruction de l'humanité et à tous les antonymes du salut - sous couvert chaque fois de sauver l'humanité du péril écologique irrémédiable et urgentissime.
Une fois de plus, l'étymologie est un redoutable révélateur contre les innombrables campagnes de propagande favorable au système (tout comme la mode marginale et anticonformiste, la propagande se présente toujours comme opposée au système au pouvoir et comme rebelle). Le déni et la mauvaise foi empêcheront sans doute les décroissants de comprendre en fin qu'ils font le jeu trouble et pervers des malthusiens. Ils s'abriteront derrière les discours scientifiques (scientistes?), la condamnation noble et courageuse du capitalisme ou la critique de l'impérialisme. Ils avanceront leur argument-massue d'un monde mieux contrôlé par l'homme et enfin compatible avec la nature polluée, souillée et détruite par les exactions humaines. Ils fustigeront la méchanceté rousseauiste de l'homme.
Las! Tout projet de décroissance n'est pas seulement un projet évident de destruction programmé et incontrôlable (par définition). La décroissance n'est pas seulement incompatible avec la structure de développement humain. Soit l'homme croît; soit il disparaît. L'homme n'est pas capable de fixité, car sa représentation du réel n'est pas celle d'un réel fixe et stable, ainsi que voudrait nous le faire accroire un Aristote, chef de file des nihilistes contre le maître Platon. L'homme se meut dans un réel qui est dynamique et en constante évolution.
L'homme a seulement le choix entre croître et décroître. Je sais bien que l'entropie est l'antienne anthropique à la mode, mais la vérité, c'est que l'univers est de forme antientropique... Dans cette configuration qui indique que notre époque est nihiliste, plus précisément immanentiste, avec comme clé de voûte le cartésien radical Spinoza, le démantèlement de la santé a valeur de slogan subliminal. D'avertissement aussi. Démanteler la santé, c'est rien moins que démanteler le salut. Démanteler ce qui sauve l'homme. Vous voilà prévenus. Si vous refusez d'entendre, désolé.

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