mercredi 4 mai 2011

La fin du début

La guerre contre le terrorisme impliquait l'existence d'un ennemi fantasmatique dont Oussama endossait la rôle de prétexte fondamental. Avec le passage stratégique de la guerre contre le terrorisme à la politique du chaos, le besoin de maintenir médiatiquement en vie Oussama devenait non seulement inutile, mais encore périlleux. Tant il est vrai que s'il est périlleux de maintenir en vie un fantôme, un zombie ou un mort-vivant, il s'avère tout à fait suicidaire de maintenir en vie une politique devenue obsolète et caduque. La guerre contre le terrorisme servait à légitimer la destruction menant vers le chaos prévisible. Dans l'agenda de l'Empire britannique, place au KO - donc.
La mort officielle d'Oussama ben Laden assassiné par des forces spéciales militaires américaines (sans la moindre once de légalité) clôt une des pires parenthèses de propagande et de folie stratégiques dans l'histoire : la guerre contre le terrorisme, qui aura duré une décennie, depuis les fameux autant que fumeux attentats du 911. Cette parenthèse dans la stratégie internationale était censée prendre la mesure de la crise terminale qui se préparait, crise systémique dont les effets sont économiques, mais dont les causes sont culturelles et religieuses. La guerre contre le terrorisme succéda à l'effondrement du monde bipolaire, avec le communisme moribond à partir de la chute du Mur de Berlin. Pendant une décennie, la dernière du vingtième siècle, les chantres du libéralisme ont claironné autour de Fukuyama par exemple que le monde unipolaire pouvait tenir à tel point que l'homme entrait dans sa phase ultime : la fin de l'histoire.
Sans soupçonner qu'ils avaient ouvert la boîte de Pandore avec cette délicieuse polysémie (la fin de l'histoire pouvant tout aussi bien en être le terme apocalyptique), nos sorbonnards de Harvard ou Cambridge ont vite dû déchanter : de multiples signes dès les années 90 indiquaient que le système économique mondialisé allait s'effondrer. La conception de la guerre contre le terrorisme avait pour but principal de légitimer cet effondrement en lui donnant une explication fantasmatique - une diversion. Ce fut le mythe d'Oussama et des terroristes jihadistes et mondialisés. Mythe propagé par Lewis et Huntington notamment.
Mais la guerre contre le terrorisme ne pouvait être qu'une parenthèse, tant les peuples du monde se sont vite rendu compte que le terrorisme islamique était très largement exagéré et que le danger relevait de la propagande grossière (comme les armes de destruction massive irakiennes). Surtout, l'alibi du terrorisme ne pouvait masquer indéfiniment l'effondrement économique en cours. Après dix ans d'attentats sous fausse bannière, de guerres impérialistes et de rumeurs fantaisistes concernant les terroristes autour de l'hydre insaisissable al Quaeda, nos stratèges de l'Empire britannique ont décidé de fermer cette parenthèse et de lancer le dernier chapitre de leur histoire.
Après la guerre contre le terrorisme, désormais caduque, il était inévitable que s'instaure rapidement la politique du chaos. Cette fois, l'histoire (fiction) retenue sera plus vraisemblable : il s'agira non plus d'accréditer le fantasme d'un ennemi imaginaire, mais de rendre légitime l'oligarchie comme remède au chaos. Comme si la cause du chaos en devenait la solution. Cette oligarchie a pour nom le NOM et pour objectif politique le gouvernement mondial (appelé de ses voeux par le FMI et les héritiers dispersés de l'impérialiste progressiste britannique Keynes).
L'assassinat d'Oussama traduit la fin programmatique de la guerre contre le terrorisme. Le terroriste en chef liquidé, le terrorisme symbolique se clôture. On pourrait gloser sur le caractère criminel et illégal de cette mort qui serait atroce si elle n'était pas aussi peu crédible - mais notre véritable pensée doit aller en direction de ceux qui sont morts avec le zombie Oussama : si les informations concernant le nombre des assassinés sont exactes, ces quatre autres individus je crois, dont une femme. La sauvagerie des méthodes impérialistes occidentales se découvre. L'Empire britannique est ce monstre terroriste qu'il a projeté sur l'image médiatique d'al Quaeda (et de ses ramifications oligarchiques de par le monde). Croire dans le monstre al Quaeda, c'est croire dans le marionnettiste monstrueux de l'Empire britannique.
Al Quaeda a été conçue selon la structure et le fonctionnement d'une faction impérialiste typique. L'assassinat ad hoc d'Oussama après dix ans de traque infructueuse annonce que le projet d'oligarchie mondiale arrive à son dernier volet : soit les peuples parviennent à repousser le chaos, soit ils seront soumis pour des décennies, voire des siècles. Oussama fini, la guerre conte le terrorisme est finie. Ce qui suivra se révélera encore pire s'il est mis en application. L'agenda impérialiste mondialiste suit un programme édicté à l'avance, selon cette croyance folle et naïve suivant laquelle le désir présente la puissance de s'imposer au cours du réel.
En estimant que l'on peut devancer la nécessité, nos stratèges, prévisionnistes et futurologues ne se rendent pas compte qu'ils sont les principaux obstacles à l'édification de leurs désirs (qui plus est monstrueux). Raison pour laquelle l'oligarchie est un système politique condamné autant que son substrat ontologique le nihilisme est damné : les deux reposent sur l'illusion magistrale selon laquelle le réel est inféodé au désir - alors que c'est le désir qui subit la loi implacable du réel. Oussama joue le rôle de vigie plus que de fantoche grotesque. Il annonce la naissance d'un nouveau monde : soit l'oligarchie, soit l'espace. Soit l'homme recroquevillé sur son domaine terrestre sclérosé et nihiliste; soit l'homme se déployant à la conquête de l'espace vers une république universelle qu'un Platon n'aurait pas reniée.

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