vendredi 15 mars 2013

Droit de réflexion

Le droit Gutenberg se rapporte au droit d'auteur. Il est en train d'exploser, parce qu'il ne correspond plus à la réalité de l'idée, qui s'émancipe de l'auteur. Le droit d'auteur impliquerait que l'auteur soit indépendant, qu'il soit l'auteur (presque) exclusif de l'idée qu'il apporte. Le grand auteur est celui qui apporte une idée nouvelle. Dans la reconnaissance individualisante du droit d'auteur, le processus ne se trouve jamais reconnu, bloqué par l'existence individuelle. Pourtant, quand on se renseigne au sujet de tel ou tel apport de philosophe, de romancier, de peintre, de musicien, on se rend compte que l'apport individuel, aussi riche soit-il, entre dans le cadre d'un processus, au-delà de l'individu. Le créateur individualisé n'est pas l'auteur unique de l'idée qu'il développe, plutôt le continuateur qui apporte des modifications renouvelant l'idée.
Cette idée, dans le schéma innovant néanthéiste, il convient de la nommer réflexion, du fait que la réflexion fait aussi bien appel à l'idée des ontologues qu'à sa nouvelle forme en enversion. Internet met en valeur la réflexion au détriment de l'auteur. Il rend l'auteur à sa vraie individualité : personne privée qui a le droit de connaître une existence normale, au lieu de la starification et de la peoplisation qui guettent les auteurs contemporains à succès et qui les condamnent à la médiocrité littéraire, autant qu'à la subversion qualitative (sous prétexte qu'ils sont des individus créatifs extraordinaires, ils versent dans la médiocrité people).
Le droit d'auteur reposait sur une exagération, qui a pour trait principal de fixer un fondement arbitraire au réel dans l'individu. C'est une émanation de l'humanisme, qui place l'homme au centre de la pensée et qui aboutira avec le libéralisme à son adaptation commerciale, plus que philosophique, dont on suit les émanations tristes et stériles de l'heure, avec sa correspondance dans le monde des arts : l'ultralibéralisme. Elle aboutit à la situation renversée des écrivains supplantés par les éditeurs, qui sont les vendeurs et qui incarnent la dérive de l'art ultralibéralisé vendant le produit artistique prévisible et stéréotypé.
Le droit d'auteur n'est pas un progrès au sens de croissance et d'amélioration réelles, mais un progrès perverti - interne au libéralisme. Il protège l'auteur dans la mesure où il assure sa médiocritisation et qu'il fige l'évolution artistique (dont littéraire) vers une forme qu'il convient de démystifier : Internet a débloqué une situation qui virait à l'entropie. Entropie de la forme éditoriale avalant la création, dans laquelle l'éditeur ne gagne en puissance sociale que dans la mesure où il perd en pérennité son pouvoir de décision; entropie de la forme littéraire, dans laquelle l'écrivain n'a pas perdu pour rien sa suprématie dans le schéma éditorial : il est devenu une forme de créateur prévisible, qui crée selon les modèles préétablis, sélectionnés par l'éditeur selon les besoins du marché, en retenant à l'intérieur des sous-genres caricaturaux et dévalorisés.
L'autofiction relève de cette qualité, puisqu'il s'agit d'un sous-genre de l'autobiographie, que son fondateur Doubrovsky reconnaît tel, et qui n'aura eu de postérité à court terme que dans la mesure où c'est la médiocrité qui permet à n'importe quelle starlette en mal de médiatisation littéraire de réclamer le statut d'écri-vaine - à n'importe quel écrivain de se réclamer de la subversion grâce à ce genre, qui consiste à raconter sa vie et à faire de cet exercice, jusqu'alors considéré comme ennuyeux, le nouveau mode d'expression privilégié de la littérature.
L'autofiction symbolise la dérive ultralibérale de la littérature. Doubrovsky le professeur agrégé d'anglais de la rue d'Ulm est le symbole de cette réussite, qui de France vers les États-Unis implique que l'on proclame le triomphe du désir et la domination fondamentale de l'homme par l'expression écrite. Doubrovsky est le seul écrivain d'autofiction qui ait réussi à faire du genre qu'il a créé une technique d'écriture intéressante, même si je la juge mineure (en tant que sous-genre de l'autobiographie). Doubrovsky a engendré une cohorte de monstres littéraires, dont la nullité va de pair avec l'inutilité.
Le dévoiement du droit d'auteur en forme de blocage de la littérature vers l'édition ultralibérale n'est pas que la transposition de l'art en commerce (vente de livres) : il implique que la littérature s'est figée en perdant sa qualité, qui consiste dans le renouvellement. La littérature a évolué dans les genres, même si certaines limites imposent un renouvellement faible et lent. L'émergence du roman moderne autour de la Renaissance, avec Rabelais notamment, n'implique nullement que l'âge d'or du roman autour du dix-neuvième siècle, même si les grands romanciers avaient perfectionné le genre, fige la littérature à ce stade.
D'autres formes doivent succéder, formes qui présentent un renouvellement d'autant plus important qu'il sanctionne l'avènement cardinal d'Internet. Le roman n'est pas une forme figée. De nos jours, quand on consulte les productions littéraires, on est frappé par leur indexation à la forme romanesque ou aux formes consignées : si le théâtre, la poésie, la nouvelle existent toujours, le roman occupe une place prépondérante, comme si la forme littéraire s'était figée depuis que le dix-neuvième siècle a sanctionné le roman comme la forme majeure, bien que d'autres formes antérieures puissent être tenues pour majeures par certains (ainsi de la poésie pour Heidegger, ou du théâtre pour certains autres observateurs).
La place primordiale du roman sur la scène actuelle s'explique parce que le roman va de pair avec le droit d'auteur. Le roman met en place les aventures picaresques d'un certain univers, d'une certaine histoire, qui convient bien à l'émergence de l'individualité moderne et des valeurs humanistes de la Renaissance. Le roman met en valeur l'univers de l'auteur et explique l'émergence connexe du droit d'auteur : pour ce critère artistique, la création ne peut s'opérer que par l'entremise et le biais de l'auteur. Protéger l'auteur permet de promouvoir la création. Le droit d'auteur est indépassable.
La mise en place du droit d'auteur va à petits feux saper les principes de l'édition, qui devait se trouver au service de l'auteur artiste et favoriser les meilleures prédispositions pour la création. Mais c'est par rapport au roman moderne, et la forme du dix-neuvième siècle, que la littérature s'est fixée et figée, au point que de nos jours, la littérature se forge par rapport à ce critère. C'est aussi pendant cette période que le droit d'auteur s'est forgé, sur le modèle du libéralisme et de l'identification de l'auteur et de l'individu, dans une forme d'individualisme de plus en plus exacerbée.
Cette identification aboutit dans sa phase terminale à l'autofiction, dans laquelle la littérature sert à raconter l'individu, plus exactement à relayer son désir. Aujourd'hui, le genre roman est réputé luxuriant, presque indépassable, alors qu'il est stéréotypé. Ceux qui le reprennent dans leur admiration mimétique n'innovent plus depuis ses formes privilégiées, entre dix-neuvième et vingtième siècles. Ils sont à la solde des éditeurs, qui refusent l'innovation et qui, emblématiques de la mentalité marchande, notamment libérale, dans notre époque d'ultralibéralisme, entendent faire de l'argent sur le principe adjuvant de l'édition, en faisant de la littérature leur cheval de Troie et en estimant qu'ils travaillent pour la cause de la littérature.
Quelles que soient les qualités de Jean-Paul Enthoven, il n'est pas seulement l'éditeur d'Onfray, moins philosophe médiocre (comme son modèle de l'exhumation contre-philosophique Théophile de Viaux); il est aussi un ami proche du propagandiste BHL, qui se réclame de figures intellectuelles prestigieuses, alors qu'il n'a fait qu'expliquer dans les médias influents qu'il convenait quand on était convenable de se placer du côté du discours des plus forts - surtout quand on est en état de faiblesse. Enthoven Sr. montre ce qu'est un éditeur influent : quelqu'un qui promeut les formes littéraires à la mode immanentiste plus profondément que libérale, en faisant en sorte que le renouvellement ne dépasse pas le stade des maigres innovations internes et culminent en des stéréotypes anti-innovants.
Enthoven Sr. a édité Doubrovsky. Bien entendu que Doubrovsky est un écrivain et qu'il a innové de manière mineure! La compréhension éditoriale d'Enthoven Sr., son appréciation littéraire, n'a été possible que parce que l'innovation que Doubrovsky proposait, l'autofiction, relevait du stéréotype de l'autobiographie et in fine de la forme romanesque. Il ne s'agit pas d'insinuer que les éditeurs influents ont conscience de leurs agissements (promouvoir des formes littéraires mineures, le plus souvent stériles), mais de considérer qu'ils expriment leurs goûts prévisibles dans une mentalité accordant la part belle au mimétisme et refusant le créatif.
Ils n'ont pas conscience de perpétrer une démarche anti-créatrice et, niant l'art et la littérature dans leur dimension supérieure, ils suivent des goûts mimétiques, qui mènent à l'appauvrissement qualitatif du donné. Dans leur cas esthético-professionnel, leur attitude aboutit à l'effet paradoxal d'appauvrir la littérature qu'ils prétendent servir. Ils ne constituent pas des agents manipulateurs de la littérature au nom du libéralisme, mais ils appliquent des recettes qu'ils considèrent comme les seules possibles et nécessaires.
Quand on se meut dans une conception du réel qui est anti-créatrice, comme c'est déjà le cas chez le fondateur de la métaphysique, Aristote, qui abolit la créativité dans le fini depuis le Premier Moteur, on aboutit au stéréotype. Et le pire, qui peut mener au snobisme, comme l'a montré l'un des derniers romanciers Proust, c'est que la mentalité s'édifie sur le mimétisme et se trouve dépourvue de conscience. L'éditeur qui agit de la sorte n'est pas dans une conspiration consciente.
Il ne se rend pas compte qu'il manipule, avec pour fin, non la manipulation, mais l'application du mimétisme, dont la particularité, un peu comme dans le complot, quoiqu'en plus large, est d'échapper à toute forme d'action consciente et rationnelle. Le mimétisme crée un fonctionnement qui déshumanise, dérationnalise et donne l'illusion de la nécessité. Il n'est pas une théorie du complot, au sens où le complot attribue à la volonté deux propriétés contradictoires et aberrantes (au contraire de Schopenhauer, qui définit la volonté comme absurde) : la conscience et le caché efficient.
La mentalité pro-éditoriale aboutit à mélanger l'écriture et l'édition. Beigbeder en France symbolise cette collusion. Assez honnête, il se réclame d'un écrivain américain, Ellis, illustrant l'écriture qui réussit dans la mesure où elle ne crée rien, et où, dans le meilleur des cas, elle s'avère mineure (ce qui est mineur n'implique nullement qu'il soit dénué d'intérêt, tant s'en faut). L'édition insinue qu'elle peut aussi verser dans l'écriture : elle l'encadre, l'inspire, la choisit et la vend. L'écriture devient oligarchique, non avec arrogance et en vue de la destruction, avec effets directs et immédiats, mais au sens où cette écriture engendre la domination statique, avec l'inclination selon laquelle la seule oligarchie en mesure de perdurer est intellectuelle.
L'application politique de nature oligarchique correspond au nihilisme, selon lequel le réel fini ne peut survivre (environné de néant) que si perdure de lui seulement la couche supérieure et dominatrice. Il ne s'agit pas de prôner la domination arrogante, destructrice des autres, mais de constater que le raisonnement nihiliste ne peut qu'aboutir à la domination, couplée à la nécessité aveugle et absurde, pour reprendre les termes de Schopenhauer. Dans ce cadre, il n'est pas possible de sortir de la domination, qui pourtant comporte son vice : l'appauvrissement.
Toute oligarchie est confrontée au spectre de sa disparition, par épuisement et diminution qualitative. Les oligarchies en fin de cycle sont portées par des incapables et des médiocres, processus entropique auquel aboutit le mimétisme. L'oligarchie si elle veut durer plus longtemps que les oligarchies militaires doit s'appuyer sur le pouvoir intellectuel. Nietzsche appelle à l'avènement d'artistes créateurs de leurs propres valeurs, pour remplacer, plus que les philosophes de la République platonicienne, les figures du religieux classique : le prophète et le prêtre.
L'inflexion de Nietzsche est immanentiste et se vit comme alternative artistico-intellectuelle, d'inspiration rationaliste, à la conception classique du religieux, selon laquelle la pensée est portée par les prêtres. Le religieux doit être remplacé dans la mentalité immanentiste par l'intellectuel, au nom du religieux rationaliste et contre la condamnation du religieux classique, prophétique, transcendantaliste et irrationaliste. L'option immanentiste domine la contemporanéité et a imprégné le monde de l'édition, en tant qu'elle constitue l'expression paroxystique du rationalisme : l'art a remplacé le religieux prophétique - et peut-être que la littérature se tient à la fine pointe de l'art contemporain.
L'écriture immanentiste et oligarchique se fonde sur le mimétisme esthétique : le refus du renouvellement - la littérature comme force de perpétuation, avec des changements mineurs concernant des formes du donné. Le droit d'auteur aboutit à protéger, non la création, mais cette inclination à l'anti-création, en faisant en sorte que l'éditeur soit le gardien du temple, celui qui décide ce qui entre dans la ligne et ce qui n'y est pas conforme. Pas facile de départager la mauvaise littérature de ce qui serait incompris comme trop créatif - ou trop éloigné des canons du donné.
L'éditeur est le censeur, non au sens conscient et délibéré, mais au sens mimétique, au service de la mentalité des plus forts, dont le propre est d'être inconsciente, irréfléchie, irrationnelle et non délibérée. Le droit d'auteur se codifie au moment où le libéralisme devient l'idéologie dominante qui gère les sociétés occidentales. Il se développe en même temps que bascule la figure de l'éditeur, de passeur courageux à marchand rentable et, en cas de succès, acculé au prestigieux. L'écrivain devient un stéréotype, riche en cas de succès, mais privé de toute liberté éditoriale.
Le droit d'auteur ne sanctionne le progrès de la condition artistique qu'à partir du moment où il exprime les valeurs libérales. En réalité, il fonctionne comme un frein au progrès intellectuel et artistique. Les réactions des écrivains emblématiques de Gutenberg face à l'éclosion Internet constituent le symptôme éclatant de ce refus réactionnaire de l'évolution technologique éditoriale, que constitue Internet, et qui amène à balayer le droit d'auteur au nom de la gratuité créatrice : un Beigbeder se montre réactionnaire ultralibéral et communiste, au sens où celui qui défend la VO ne peut comprendre la portée de l'innovation Internet.
Pour lui, en tant que symbole, Internet = recul du droit d'auteur, et donc de la création littéraire. Internet = censure, au sens où le paradigme Gutenberg se trouve balayé. Le style Beigbeder ne peut s'épanouir sur Internet, selon les conditions de la gratuité éditoriale (qui battent en brèche le droit d'auteur)? C'est bon signe, car cela indique sa valeur littéraire (médiocre), et le vent frais que représente l'outil Internet. Alors que les vampires étaient en train de sucer l'art au nom de la liberté libérale, Internet les démasque et ouvre la porte au renouvellement.
Nabe le bobo jazzy, un écrivain qui pose au Grand dans la lignée de Céline, a proposé une innovation perverse, qu'il estime subversive et géniale, parce qu'il ne comprend ni la littérature, ni l'édition. Il agit en héritier du milieu artistico-bobo, voulant tirer le maximum (de profit) de son écriture; dans cette confusion, être libre reviendrait à dominer artistiquement les autres. Nabe a inventé l'antiédition pour supprimer l'intermède de l'éditeur et accroître l'emprise de l'écrivain resté Gutenberg. Il est le parasite de l'écrivain resté Gutenberg et emprisonné dans sa bulle : un contre-cultureux, contre Internet et pour Gutenberg. Nabe n'a pas compris ce qu'était Internet et se sert d'Internet comme d'un moyen de détruire le droit d'auteur avec éditeur pour maximiser le droit d'auteur sans éditeur.
Il se comporte en écrivain totalement dérégulé, allant encore plus loin que le libéralisme Gutenberg et trahissant Internet dans son dépassement de Gutenberg. Internet signifie que la fin de Gutenberg est atteinte et que tous ceux qui s'entêtent, comme ces deux cas de réaction (intellectuelle, politique et technique), à empêcher le progrès Internet ne feront qu'accélérer leur seule destruction : leur production littéraire s'avère frappée du sceau de la réaction, tandis que leur ancrage Gutenberg les conduit à la disparition au nom de leur ancrage à leur temps.
L'incompréhension d'Internet n'est pas l'incompréhension sociale d'une caste d'écrivains bobos ou germanopratins, qui aurait éludé l'intégralité chamarrée de la littérature - plus que de la République des Lettres, qui recoupe le lieu de l'édition à la mode. L'incompréhension de la mentalité Gutenberg n'est pas délibérée, consciente, personnalisée, mais découle d'un processus mimétique, englobant les individus du coup dépassés, conscients par leurs intérêts inférieurs, manipulés par une mentalité réificatrice et impersonnelle, les poussant à croire qu'en cas de succès, ils incarnent des élus chanceux, qui portent en eux le don de la création artistique, alors que ce qu'ils prennent pour de l'art relève de la création finie - un redoutable oxymore.
Le droit d'auteur est fini. Pas dans l'immédiat, mais en tant que principe, parce que le droit d'auteur est une application de Gutenberg, à partir du moment où le libéralisme commence à conférer à l'écriture un fondement qui n'est pas seulement juridique ou économique, mais qui réduit la visée artistique telle que la définit l'humanisme de la Renaissance à du commercial. C'est dans cette réduction que s'édictent les critères d'édition de la littérature, et au-delà de l'art, qui appliquent des modes pour vendre, puis en viennent à croire qu'ils font la qualité littéraire, alors que leur conception de la littérature relève de la mentalité libérale et procède de la réduction idéologique plus encore que - commerciale.
Le roman est réduit à l'autofiction, la littérature à l'idéologie. La littérature n'est qu'un pan de l'expression artistique. Le droit d'auteur n'est pas un progrès par rapport à la conception de l'écriture que pouvaient se faire des écrivains aussi variés que Platon, Saint Augustin ou Shakespeare, droit qui garantirait leurs idées en permettant d'en vivre. Si l'avènement du droit d'auteur conforte, le confort en prime, l'écrivain, elle fait primer l'individu et son ego, et avec l'enflure suivant le romantisme, qui croît, notre auteur devient le dandy boursouflé et le prince des médias de nos jours, privilégiant son ego sur son art.
Dans ces conditions, le droit d'auteur n'est qu'un progrès relatif, sis à l'intérieur de la trajectoire Gutenberg. Il n'améliore pas le statut des écrivains et de leurs idées, comme on peut le vérifier avec la qualité des écrivains qui précèdent la mise en place de ce droit. Le droit d'auteur, quand il est pris comme finalité immuable et inaliénable, tend à pervertir l'auteur, en faisant du garant, non pas le serviteur de ses idées, mais leur fin - finie. L'avènement d'Internet vient rappeler que le droit d'auteur ne vaut que dans les normes Gutenberg et que, pour des normes supérieures, la hausse qualitative du paradigme de l'expression et de l'édition, redéfinit les contours de ces normes.
Internet rend caduc le droit d'auteur, en haussant la valeur des idées au-delà des individus. Aucun individu ne peut réclamer de droit d'auteur sur une idée, puisqu'il n'en est pas le dépositaire strict et qu'il n'en est qu'un moyen, aussi important soit-il. Internet a pour fonction principale, non de promouvoir le culte de l'écrivain, comme l'entend un Nabe avec son antifiction qui exprime toute sa négativité personnelle, anti fondamental et pro rien, mais de hausser la qualité des idées, en faisant en sorte qu'elles s'expriment comme principes non soumis à la réduction individuelle et égotiste. Pour ce faire, Internet est la révolution technologique qui supprime la fonction éditoriale et qui confère aux idées une portée qui dépasse l'individu.
De ce fait, l'homme accède à la dimension intellectuelle supérieure, au sens où le monothéisme propose un entre-deux entre le physique et l'idée. Ce n'est pas qu'Internet soit la fonction finale de l'expression humaine; tout comme le néanthéisme ne constitue pas l'expression religieuse finale. Mais ils représentent un progrès important, qui explique que la crise actuelle traduit le changement de paradigme, pas un effondrement vers le pire, de type pessimiste dans un environnement absurde, qui est une conséquence du nihilisme, mais qui ne constitue ni la claire revendication du nihilisme, ni sa propre conception du réel. Le nihilisme est réaliste au sens où le réel correspond à l'homogène et l'uniforme. 

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