lundi 27 novembre 2017

Le réel et son doute II

Qu’est-ce que le doute? Un sentiment. Qu'est-ce qui garantit son caractère de réel? C'est tout au plus une évaluation, un jugement, pas un objet qui possède de la réalité. La contradiction consiste à estimer que le doute aurait de ce fait une valeur de vérification. Descartes confond ici ce qui est réel et ce qui existe. 
Le doute existe bien, mais n'est pas un objet sis dans le réel. Seul ce qui dans le réel peut être vérifié. Donc le doute ne peut être vérifié. Dès lors, il ne peut davantage être vérificateur.
Pour le dire autrement, pour que le doute puisse être vérifié, encore faudrait-il qu'il soit doté de stabilité. Or il peut aussi bien être vrai que faux. Il n'offre qu'une évaluation. 
Descartes se livre à un coup de force quand il estime trouver la vérité par le doute. Peut-on trouver le certain par l'incertain? Si Descartes recourt au doute pour trouver la  vérité, c'est parce qu'il a besoin de prétendre dans son système qu'on peut dans une situation de négativité en venir à acquérir de la positivité par les seule lumière de la raison.
En réalité, le choix du doute empêche qu'on sorte de la négativité, puisque la négativité + la certitude = quoi qu'il arrive la négativité, et en aucun cas la positivité. La métaphysique de Descartes  est un machine à enfermer la pensée dans le négatif.
Quel type de pensée? Est-ce de l'imagination? Non, il ne s'agit pas de fariboles, mais bel et bien de création rationnelle. C'est le déploiement de la raison qui engendre ces résultats douteux, incertains, où ce qui compte au fond n'est pas tant de trouver une méthode de connaissance objective qu'une méthode de cohérence interne, qui permette de s'abstraire du réel.
Le doute est l'expression de la raison tournée vers elle-même, qui se coupe de l'extériorité. Non que Descartes veuille s'en couper, mais que le critère de certitude qu'il édicte par le doute l'amène à déterminer un système qui peine à sortir de son état d’intériorité. Le négatif signifie donc qu'on se réfugie dans sa tour d'ivoire, qui se nomme intériorité.
L’intériorité, c'est l'évaluation. Autrement dit, le négatif pur n'existe pas, mais ce qui existe, c’est le négatif en tant qu'opération de scission visant à isoler un élément de réel et à en faire abusivement l'ensemble. L'évaluation se prêt bien à cette méthode d'enfumage, car elle relève d'un domaine de réalité qui n'est pas quantifiable.
De ce fait, elle peut donner le sentiment qu'elle est tout la réalité certaine, au motif qu'il n'est rien de plus certain que ce qui est invérifiable. Et l'évaluation l'est. 
La méthode cartésienne amène dans le même temps à évacuer les faits et les objets. Du coup, elle n'est jamais vérifiable, ce que Descartes voulait : soustraire la philosophie à la méthode expérimentale. Le doute relève du processus mental, privé du critère de vérité. Du coup, la connaissance n'est pas possible dans ce système et le douteux signifie in fine que la connaissance de l'évaluation n'est pas la connaissance au sens classique du mouvement qui porte sur le réel.

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